Le stress : un enjeu majeur chez les mères d’enfants autistes
Depuis plus de trente ans, le processus d’acceptation, communément appelé le deuil de l’enfant normal, est cité d’emblée comme l’enjeu majeur lorsqu’un enfant s’avère autiste. En 1993, le psychologue Maurice Bhérer publiait un livre dans lequel il expliquait que les parents passent par un processus d’adaptation à la suite de l’annonce d’un diagnostic chez un enfant. Ainsi, les étapes du choc, du déni, du désespoir, du détachement et de l’acceptation se succèderaient. Longtemps, les parents d’enfants autistes ont adhéré à ce processus.
En revanche, cette trajectoire ne fait plus l’unanimité dans la communauté québécoise des parents d’enfants autistes. Elle est remise en question par certains parents et même dénoncée par d’autres qui affirment n’avoir jamais traversé ces étapes dans cet ordre ou même, que leur processus d’acceptation n’était pas en lien avec les caractéristiques que l’on attribue à l’enfant autiste. Par ailleurs, ils ne comprennent pas en quoi, le fait que leurs enfants soient autistes devrait engendrer un deuil. Le concept de neurodiversité étant bien établi dans notre communauté, cette prise de position n’est pas surprenante. Ce seraient plutôt les diverses sources de stress parental qui seraient l’un des enjeux majeurs. Principalement, chez les mères. Il est, en effet, démontré que le stress parental est plus élevé chez les mères d’enfants autistes. L’accumulation des stresseurs quotidiens ainsi que ceux liés aux besoins d’adaptations afin de maximiser le plein potentiel de leur enfant autiste, auraient des effets considérables sur leur niveau de stress.
Il est question de stress parental lorsqu’un parent perçoit qu’il ne possède pas les connaissances ou les compétences lui permettant de surmonter les embûches qu’il doit affronter dans le cadre de ce rôle. Parfois, à tort ou à raison, le parent vit un sentiment d’impuissance dans diverses situations. Cette perception engendre une réaction au stress puisque l’absence de contrôle ainsi que la nouveauté et l’imprévisibilité des enjeux peuvent fragiliser l’égo et donner l’impression que les ressources, autant personnelles qu’externes, nécessaires pour faire face à l’adversité ne sont pas suffisantes. Les ressources externes font référence aux services reçus, mais également, à la bienveillance de l’entourage. Quant aux ressources personnelles, il s’agit des forces internes qui sont propres à chaque individu. Dans un cas comme dans l’autre, il est important de considérer que ces dernières peuvent varier dans le temps. Le niveau de stress peut donc être différent en fonction des situations et des périodes de la vie du parent. Par exemple, une perte d’autonomie financière est fréquemment évoquée chez les mères, environ deux ans après avoir obtenu le diagnostic d’autisme de leur enfant.
Ainsi, les conséquences négatives vécues et les diverses sources de stress n’auraient pas le même effet chez chacune des mères d’enfants autistes. L’hypothèse des trois profils de stress parental (profils détachés, épuisée ou manifestant un stress aigu) explique un style d’adaptation distinct. Ce qui ressort de cette hypothèse est que les mères d’enfants autistes ne mettront pas en place les mêmes mécanismes d’adaptation. Donc, même si, à première vue, la réalité des mères d’enfants autistes peut sembler similaire et qu’il est tentant de penser une seule et unique façon d’expliquer leur trajectoire, à la suite de l’obtention du diagnostic de leur enfant, l’hypothèse des trois profils démontre plutôt une hétérogénéité des profils. En conséquence, il est important de réfléchir les interventions auprès de la famille, non seulement en raison des besoins de l’enfant autiste, mais également, en considérant le vécu parental.
Sources :
Bhérer, M. (1993) Collaboration parents-intervenants : guide d’intervention en réadaptation, Montréal, Gaëtan Morin éditeur, 158-159.
Ratté, V. & Fecteau, S.-M. (2022). Le vécu des mères d’enfants ayant un trouble du spectre de l’autisme : comprendre l’adaptation parentale pour mieux soutenir en période de stress. Revue de psychoéducation, 51(1), 151–173. https://doi.org/10.7202/1088633ar
Article rédigé par la Fédération québécoise de l'autisme.