Je veux débuter un projet d’habitation, qui interpeller?


Les projets d’habitation en déficience intellectuelle (DI) et autisme ont la mission d’offrir aux personnes un milieu de vie qui leur permet de se réaliser, de développer leur plein potentiel, de pouvoir se déplacer et de participer à la vie d’un quartier.

Apprenez-en davantage sur la logique d’habitation et découvrez les rôles et les défis des différents acteurs impliqués dans le développement d’un projet d’appartements supervisés.

Les aspirations résidentielles

Les adultes ayant une DI ou autistes aspirent à accéder à un véritable chez-soi comme tout citoyen à part entière.

Différents programmes éducatifs, notamment ceux offerts aux adolescents en milieu scolaire, sont axés sur le développement de l’autodétermination et des habiletés socio-résidentielles. La planification de la transition vers la vie adulte (TÉVA) implique d’aborder les différentes options résidentielles et vient nourrir l’ambition d’habiter dans un véritable chez-soi au lieu d’être hébergé dans une ressource de type familial (RTF) ou intermédiaire (RI).

Alors que la logique d’hébergement donne une réponse minimale aux besoins de base des personnes, la logique d’habitation offre accès à un milieu de vie qui permet de se réaliser, de développer son plein potentiel, de pouvoir se déplacer et de participer à la vie d’un quartier.

Les appartements supervisés

Les appartements supervisés sont des milieux de vie permanents qui découlent du droit commun et offrent le soutien requis selon la situation de la personne ayant une DI ou autiste. La personne est locataire de son appartement et peut y habiter le temps qui lui convient.

Ce type de projet d’habitation ne s’inscrit pas dans une logique de « placement » mais bien dans celle d’un environnement de vie qui soutient l’autodétermination de la personne et le développement de son plein potentiel.

Dans ce type d’habitation, le réseau de la santé et des services sociaux n’est habituellement pas porteur du projet, mais agit plutôt comme partenaire. D’autres catégories d’acteurs sont également mobilisées pour que le projet prenne vie.

J’ai mon appart’

J’ai mon appart’ est un organisme à but non lucratif fondé en 2018 à Shawinigan par des parents de personnes ayant une DI ou autistes qui souhaitaient permettre à leurs jeunes adultes d’habiter avec fierté dans leur propre appartement.

Créé dans le cadre du programme AccèsLogis (volet III) de la Société d'habitation du Québec (SHQ), ce projet d’appartements supervisés permet aux personnes d’avoir leur propre « chez-soi » et d’être des citoyens à part entière dans leur communauté.

Chacun des 11 logements à prix modique est composé d’une chambre, d’un salon, d’une cuisine, d’une salle de bain et d’espaces de rangement. Un 12e logement est réservé pour un « locataire-ressource ».

Le conseil d’administration

À la lecture des démarches faites par J’ai mon appart’ et d’autres organismes avec une mission similaire, il apparaît que le conseil d’administration (CA) est toujours l’organe principal qui vient porter les projets de développement d’habitations pour les personnes qui ont une DI ou autistes. 

Le CA assume le leadership et agit comme pivot dans une logique de concertation et de collaboration. La principale compétence à développer par les membres administrateurs est d’ailleurs celle de créer des arrimages entre les différents acteurs impliqués d’un système où chaque composante s’est constituée en silo.

Les principaux défis à relever sont d’accéder à l’information nécessaire pour actualiser le projet, recueillir une contribution suffisante en argent et en nature de la part du milieu et travailler à l’acceptabilité sociale du projet.

Les parents

Les parents des personnes ayant une DI ou autistes investissent un nombre impressionnant d’heures dans le cadre des différentes activités liées au développement du projet d’habitation. Selon leurs intérêts et leurs capacités, certains s’impliquent sur le conseil d’administration alors que d’autres jouent un rôle périphérique. Certaines familles deviennent des porte-paroles du projet en témoignant de leur expérience et de leur espoir.

Au-delà d’être partie prenante du projet, le principal défi des parents est de soutenir la préparation de leur enfant à la transition résidentielle tout en s’y préparant eux-mêmes.

Un constat commun est apparu dans l’analyse faite de divers projets d’habitation alternative. En s’investissant autant pour le développement du projet, les parents perdent souvent de vue leurs propres besoins dans le cadre de la transition résidentielle à venir.

Les personnes ayant une DI ou autistes

Les futurs locataires ont un rôle actif à jouer dans le développement du projet d’habitation, notamment en contribuant à son acceptabilité sociale. Certains sont d’excellents communicateurs et très à l’aise d’agir en tant que porte-paroles. Les mettre de l’avant et leur donner une voix permet aux citoyens du quartier qui n’ont pas eu l’occasion de côtoyer des personnes avec une DI ou autistes de se créer une représentation juste et positive de leurs futurs voisins. 

Les principaux défis des personnes avec une DI ou autistes sont de se préparer à la transition résidentielle tout en faisant part de leurs besoins, leurs préférences et leurs souhaits dans le développement du projet.

Il est primordial que les personnes soient impliquées à chaque étape du processus. Valoriser leur rôle et leur autodétermination facilite la transition résidentielle à venir.

Les groupes de ressources techniques (GRT)

Les groupes de ressources techniques sont des entreprises d’économie sociale qui détiennent une expertise dans le développement de l’habitation communautaire et qui offrent un accompagnement aux membres du conseil d’administration et au groupe qui porte le projet.

Il est recommandé de rencontrer plusieurs GRT afin de choisir celui qui respecte le mieux les valeurs et la logique du projet ainsi que les besoins des futurs résidents.

La société d’habitation du Québec (SHQ) et la Société canadienne d’hypothèque et de logement (SCHL)

Le principal rôle de la SHQ et la SCHL est de mettre en œuvre des programmes et des services relatifs à l’habitation, notamment au niveau du montage financier.

Comme ces programmes évoluent sans cesse et ne sont pas facilement accessibles et compréhensibles, il est recommandé d’être guidé par un GRT.

Les acteurs du milieu politique

Les acteurs de la politique municipale ont le pouvoir de contribuer de manière considérable au développement d’un projet de logements supervisés avec notamment le don d’un terrain et un crédit de taxes municipales. 

Ils ont le devoir de reconnaître les personnes ayant une DI ou autistes comme des citoyens à part entière et de s’assurer que des réponses adéquates à leur besoin d’accès aux logements abordables existent au sein de la municipalité.

Les politiciens municipaux sont également d’excellents porte-paroles pour présenter le projet à la communauté, lui donner une légitimité et en faire une fierté collective.

Les acteurs de la politique provinciale et fédérale ont quant à eux le rôle de dénouer les impasses bureaucratiques et de faire évoluer les politiques en place. Leur plus grand défi? Contribuer à trouver des solutions aux besoins d’hébergement de leurs citoyens ayant une DI ou autistes qui soient répétables et qui tiennent compte des contingences administratives et des limites de ressources.

Les organisations philanthropiques

Les organisations philanthropiques peuvent jouer un rôle déterminant dans le développement de logements supervisés en mettant sur pied des activités de financement, en faisant des dons significatifs et en offrant une visibilité au projet.

Le principal défi que ces organisations ont à relever est de nourrir l’engagement de la communauté et de créer un élan de solidarité collective.

Les Centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS et CIUSSS)

Les CISSS et les CIUSSS, bien qu’ils n’aient pas le mandat de porter les projets d’appartements supervisés, demeurent des partenaires essentiels, notamment en offrant des services aux locataires avec une DI ou autistes comme ils le font dans d’autres milieux de vie.

Leur rôle est centré sur l’accompagnement des individus et le soutien à la transition résidentielle. Ils peuvent également faciliter et conclure des ententes de financement avec les différents organismes impliqués.

Les entreprises et les commerces locaux

Les appartements supervisés ont comme mission de donner accès à un milieu de vie qui permet de se réaliser et de participer à la vie d’un quartier à titre de citoyen à part entière. Les entreprises et commerces locaux sont des acteurs importants à solliciter. Ils peuvent contribuer au projet par des dons en argent ou en nature ainsi que faciliter l’inclusion sociale et l’autodétermination des locataires avec une DI ou autistes. Plus l’acceptabilité sociale du projet est importante, plus les entreprises avoisinantes voudront s’impliquer en cohérence avec les valeurs promues par l’organisme.

Les voisins et les citoyens

Un défi majeur dans le cadre d’un projet d’appartements supervisés est qu’il se développe en synergie avec ce qui existe déjà dans le quartier. Aller à la rencontre des voisins pour démystifier le projet et répondre à leurs questions est assurément une étape cruciale. Les citoyens qui n’ont jamais côtoyé des personnes avec une DI ou autistes pourront s’en faire représentation juste et positive et nourrir ainsi leur rôle de voisins accueillants et inclusifs.

Des alliés naturels, comme par exemple la grand-mère d’un enfant autiste ou un intervenant en DI, habitent parfois dans le quartier. Il est bénéfique d’identifier ces personnes et de les mettre à contribution notamment comme relayeur d’information.

Les médias

Un projet d’appartements supervisés doit commencer à exister pour les gens du quartier bien avant qu’il ait pignon sur rue. Plus le projet en gestation est mis de l’avant tôt dans l’imaginaire collectif, plus la sollicitation des différentes catégories d’acteurs sera facile et fructueuse.

Les médias jouent un rôle majeur dans l’acceptabilité du projet en agissant comme relayeur d’information. Les entrevues et les reportages à caractère « humain », qui mettent de l’avant la réalité de jeunes adultes avec une DI ou autistes qui aspirent à avoir un chez soi comme tout le monde, sont toujours très performants pour capter l’intérêt des citoyens et sensibiliser la population. L’implication des futurs locataires dans le processus médiatique à titre de porte-paroles a une portée positive significative.

Article rédigé par la Chaire Autodétermination et Handicap.