Soutenir l’autodétermination en milieu scolaire : quelle posture adopter?
L’autodétermination étant un besoin pour tous les êtres humains (Deci et Ryan, 1985), on doit s’y intéresser en milieu scolaire et prioriser son développement pour chaque élève. Le programme éducatif CAPS - Compétences axées sur la participation sociale (MEES, 2019), destiné aux élèves ayant une déficience intellectuelle moyenne à sévère, mentionne d’ailleurs l’importance de soutenir l’autodétermination pour arriver à développer la participation sociale.
L’autodétermination, c’est quoi?
L’autodétermination consiste à agir librement et sans influence externe indue afin d’exercer du pouvoir et d’avoir du contrôle sur sa vie (Wehmeyer, 2003; Shogren et al., 2015). Il s’agit également d’exercer du contrôle sur les dimensions que l’on considère importantes (Abery et Stancliffe, 2005) et d’être le maître d’œuvre de sa vie afin d’en améliorer la qualité (Wehmeyer, 2005).
Quelle est la différence entre l’autonomie et l’autodétermination?
L’autonomie, telle qu’on la voit souvent en milieu scolaire, fait référence à la capacité à accomplir des choses seul, sans aide. On parle alors d’autonomie d’exécution (Rocque et al., 1999). Lorsqu’il s’agit d’autodétermination, le concept fait référence au fait de poser des actions pour soi et d’agir en fonction de ses intérêts et ses besoins. (Charette, et al., 2022)
Quelles sont les pratiques à privilégier pour soutenir l’autodétermination des élèves?
Des enseignantes en classes spécialisées ont pu identifier des pratiques pour aider les élèves à apprendre à s’autodéterminer (Charette, 2020; Charette et al., 2022) au travers de divers projets en collaboration avec le milieu universitaire.
Au-delà de certaines capacités spécifiques à développer (faire des choix, prendre des initiatives, apprendre à se connaître, etc.), le développement de l’autodétermination des élèves nécessite d’adopter des attitudes et une posture spécifique.
8 mots-clés pour une posture qui encourage le développement de l’autodétermination*
Observer :
- Observer l’élève afin de voir émerger certains comportements et identifier les besoins derrière ceux-ci;
- Porter attention aux actions et réactions de l’élève ainsi qu’aux contextes dans lesquels elles surviennent;
- Observer les capacités (forces et défis), la communication, les interactions et l’environnement à l’aide d’outils, mais aussi de manière spontanée, dans l’action;
- Prendre du recul, laisser de la place aux élèves
Attendre :
- Laisser du temps à l’élève afin qu’il puisse prendre des initiatives;
- Lui laisser la chance de résoudre lui-même les problèmes qui se présentent au quotidien;
- Être patient!
Écouter :
- Prendre le temps d’écouter l’élève, le laisser aller au bout de sa pensée et lui laisser le temps de s’exprimer;
- Porter attention à la communication non verbale;
- Prendre l’élève au sérieux et laisser place à ses opinions, ses émotions et ses questionnements. Se rappeler qu’être écouté est un droit!
Soutenir :
- Se placer dans un rôle de guide et adapter le soutien selon les besoins de l’élève;
- Soutenir l’élève dans sa compréhension, lui enseigner des stratégies et lui offrir des outils afin qu’il développe son autonomie;
- Choisir des interventions qui laissent davantage de place à l’élève, l’encourager, miser sur la prise d’initiative et non sur le résultat.
Assouplir :
- Faire preuve de souplesse dans l’organisation de la classe;
- Ajuster sa planification en fonction des besoins et des intérêts des élèves;
- Saisir les opportunités spontanées propices au développement de l’autodétermination.
Permettre :
- Proposer un environnement qui permet à l’élève de faire des choix, de prendre des initiatives, d’explorer et de s’affirmer;
- Soutenir le développement de la connaissance de soi.
ATTENTION! Tous les types de choix ne soutiennent pas nécessairement l’autodétermination.
Un choix qui soutient l’autodétermination doit :
- Répondre à un besoin ou un à intérêt réel et correspondre aux préférences de l’élève;
- Être libre de l’influence de la personne qui le propose;
- Permettre à l’élève de changer d’idée ou de refuser.
Interagir :
- Développer les habiletés interactionnelles en suivant les initiatives de l’élève, en donnant du sens aux mots, aux gestes et aux sons qu’il fait et en lui donnant des indices pour poursuivre l’échange;
- Utiliser la rétroaction descriptive, expliquer nos demandes, adopter une posture d’égal à égal et être empathique afin de laisser de la place à l’élève.
Lâcher prise :
- Laisser l’élève explorer son environnement et expérimenter de nouvelles actions;
- Accorder sa confiance à l’élève et accepter une certaine prise de risque :
- Évaluer les probabilités que le risque s’avère réel, qu’il ait des conséquences graves et pour qui;
- Adapter l’environnement et soutenir l’élève afin que le risque soit acceptable et partager la responsabilité de cette prise de risque.
Pour aller plus loin sur la notion de risque, consultez cet article!
L’autodétermination est un levier important au développement de la participation sociale. Le milieu scolaire constitue un environnement propice pour permettre à l’élève d’acquérir les habiletés nécessaires pour s’autodéterminer. En adoptant un rôle d’accompagnateur, les intervenants scolaires sont des acteurs de soutien important et ce, pour tous les élèves!
- Pour voir l’outil complet, réalisé par la Chaire Autodétermination et Handicap et des enseignantes et conseiller.ères pédagogiques du CSS de Laval, cliquez ici!
- Un article pour aller plus loin : Les pratiques pédagogiques qui soutiennent le développement de l’autodétermination des élèves ayant une déficience intellectuelle : regards d’enseignantes impliquées dans une communauté de pratique (Charette, Caouette, Chatenoud, Otis, 2022)
- La conférence de Catherine Charette pour L’accompagnateur : Soutenir l'autodétermination en milieu scolaire : Quelle posture adopter ?
Sources :
Abery, B.H., et Stancliffe, R. J. (2003). A tripartite ecological theory of self-determination. Dans M. L. Wehmeyer, B. H. Abery, D. E. Mithaug, et R. J. Stancliffe (dir.). Theory in self-determination: Foundations for educational practice. (p. 43-78). Springfield, IL: Charles C. Thomas Publisher, LTD.
Charette, C. (2020). L’autodétermination des élèves présentant une déficience intellectuelle scolarisés en classe spécialisée au primaire : représentations des enseignants. [Mémoire]. Université du Québec à Montréal.
Charette, C., Caouette, M., Chatenoud, C., Otis, A-S. (2022). Les pratiques pédagogiques qui soutiennent le développement de l’autodétermination des élèves ayant une déficience intellectuelle : regards d’enseignantes impliquées dans une communauté de pratique. La Nouvelle Revue Éducation et sociétés inclusives, 94, 109-128p.
Deci, E. L., et Ryan, R. M. (1985). Intrinsic motivation and self-determination in human behavior. New York, NY: Plenum Press.
Ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur (MEES). (2019). Programme CAPS-I. Compétences axées sur la participation sociale. Programme destiné aux élèves présentant une déficience intellectuelle moyenne à sévère. Québec: Gouvernement du Québec.
Rocque, S., Langevin, J., Drouin, C., Faille, J. (1999). De l’autonomie à la réduction des dépendances. Montréal: Éditions Nouvelles.
Shogren, K.A., Wehmeyer, M.L., Palmer, S. B., Forber-Pratt, A.J., Little, T.J et Lopez, S. (2015). Causal Agency Theory: reconceptualizing a functional model of self-determination. Education and Training in Autism and Developmental Disabilities, 50 (3), 251-263p.
Wehmeyer, M.L. (2003). A functional theory of self-determination: definition and categorization. Dans Theory in self-determination: Foundations for educational practice. (p. 174-181). Springfield. IL: Charles C Thomas Publisher, LTD.
Wehmeyer, M. L. (2005). Self-determination and individuals with severe disabilities: Re-examining meanings and misinterpretations. Research and Practice for Persons with Severe Disabilities, 30(3), 113-120.
Article rédigé par la Chaire Autodétermination et Handicap.